Duchâtelet vs Venanzi: quatre ans de règne, deux styles opposés
Un titre manqué, une relation compliquée avec les fans : le passage de Duchâtelet au Standard ne fut pas un long fleuve tranquille.
- Publié le 10-08-2019 à 13h15
- Mis à jour le 10-08-2019 à 13h50
Duchâtelet : Un titre manqué, une relation compliquée avec les fans : le passage de Duchâtelet au Standard ne fut pas un long fleuve tranquille.
"Je n’aurais jamais dû racheter le Standard." Ces mots, lancés deux ans après qu’il a remis le club entre les mains de Bruno Venanzi, marquent bien le fardeau qu’a représenté la présidence du Standard aux yeux de Roland Duchâtelet.Résultats
Avant le rachat du Limbourgeois, le Standard reste sur deux titres et une Coupe en quatre ans. "Le challenge est important, vu les résultats ces dix dernières années. Nous ne pouvons dire aujourd’hui si nous serons à la hauteur, mais soyez certains qu’on va tout faire pour assurer le relais de la meilleure façon qui soit", déclarait-il lors de son intronisation. Sous Duchâtelet, le Standard parviendra toujours à se qualifier pour les PO1. Le président limbourgeois des Rouches vivra deux campagnes européennes. La première, en 2011, sera de bonne facture avec une élimination en 8es de finale. La seconde, en 2013, sera un échec total. Cette saison-là, conscient d’être attendu par ses fans après la non-prolongation de Mircea Rednic (voir ci-contre), Duchâtelet ramène Carcela et De Camargo à Sclessin pour jouer le titre. Ce dernier filera entre les pattes liégeoises lors des deux dernières journées de PO1.
Communication
"Ma communication en football a parfois été catastrophique." Après avoir quitté le club, Roland Duchâtelet a reconnu qu’il n’excellait pas dans l’art de la communication. Sous sa présidence, le Standard s’est parfois fendu de communiqués aussi loufoques qu’inutiles, souvent dirigés vers l’arbitrage. À de nombreuses reprises, les supporters ont déploré son manque de clarté dans la politique sportive du club ainsi qu’au niveau des finances. En juin 2013, pour calmer la fronde dont il fait l’objet, Roland Duchâtelet y va d’une déclaration maladroite : "Je m’engage à quitter le club si nous ne terminons pas la saison sur le podium."
Relation avec les fans
Vu comme le héros belge qui chassait l’envahisseur néerlandais représenté par Value 8, Roland Duchâtelet va vite devenir l’ennemi numéro 1 des sympathisants liégeois. Les ventes des joyaux rouches qu’étaient Carcela, Defour, Mangala et Witsel (même si plusieurs d’entre eux avaient déjà reçu un bon de sortie de l’ancienne direction) jetteront les bases d’une relation qui sera tendue du début à la fin. Le retrait des 20 M € sous forme de dividendes en 2013 marquera aussi une rupture totale avec les fans. Les actions se multiplient en tribune et la virulence des supporters à l’égard du président ne cesse de croître. En juin 2013, des supporters s’introduisent dans son bureau à Sclessin pour lui exposer, de façon musclée, leur mécontentement. Quelques jours plus tard, des incidents éclatent lors du Business Meeting. Plus de 5 000 personnes font irruption dans le stade et font fuir le président. Ce dernier déclarera, au moment de partir : " J’ai pris l’habitude de décompter le temps qu’il me reste à vivre en pleine forme. Je m’étais fixé l’objectif des 75 ans… il me reste donc 350 semaines à vivre en bonne santé. Et il se fait que la qualité de la vie et le bonheur personnel jouent un rôle prépondérant dans mon approche. Il se fait que c’est devenu compliqué pour moi au Standard. Pas seulement pour moi d’ailleurs…"
Finances
Roland Duchâtelet débourse 32 M € en 2011 pour s’offrir le Matricule 16. Lors de l’exercice 2010-2011, le club a enregistré une perte d’exploitation de 5 M € qui sera compensée par les 30 M € représentés par les ventes de Defour, Witsel, Mangala et Carcela. En 2013, Roland Duchâtelet retirera 20 M € des caisses sous forme de dividendes. "C’est une opération fiscale destinée à éviter de payer trop d’impôts", précisera-t-il. En 2015, il vendra le club contre 16 M à 19 M €. À l’arrivée, il aura réalisé un bénéfice oscillant entre 11 M et 14 M €.
Venanzi : Des erreurs de casting, un amour du club, deux fois les PO2, mais deux Coupes.
Son sourire éclatant en ce 25 juin 2015 contraste avec les traits serrés de celui à qui il succède, usé par quatre années de présidence. Bruno Venanzi, vice-président du Standard en novembre 2014, rachète les parts de Roland Duchâtelet et devient actionnaire majoritaire et président de son club de cœur.
Résultats
Dès son intronisation, Bruno Venanzi conquiert le cœur des supporters en promettant un titre tous les deux ans. Il met aussi la barre très haut. Le Standard vivra une saison 2015-2016 chahutée avec l’élimination précoce en préliminaires d’Europa League mais aussi avec la non-accession aux PO1. La Coupe remportée au détriment du Club de Bruges sera, de l’avis de tous, l’arbre qui cachait la forêt. La deuxième saison, le Standard ne parviendra pas à sortir des poules en Europa League et il échouera à nouveau dans la course aux PO1. Un titre de vice-champion et une Coupe de Belgique en 2018 ramèneront un climat plus serein à Sclessin. L’arrivée de Michel Preud’homme ainsi que la troisième place et la belle campagne européenne de la saison dernière confirmeront que le Standard de Venanzi se bonifie avec le temps.
Communication
Pour son premier jour en tant que président, Bruno Venanzi y va de sa première punchline : "J’espère être là pour vingt ans." Le Liégeois découvre également le monde du football, et sa naïveté aura parfois raison de lui. C’est notamment le cas en septembre 2015, lorsqu’il lâche une bombe sur une chaîne web : "Un joueur du Standard a payé son entraîneur pour jouer." Quelques mois plus tard, après la victoire en Coupe, il écrira sur son compte Twitter : "Après les chips, la bière." Des maladresses qui lui serviront, par la suite, de leçons, puisque l’homme fort de Sclessin se fera plus discret et déléguera sa communication. Depuis un an, le président se fait d’ailleurs très discret et a pris du recul, laissant la gestion au quotidien à son directeur général, Alexandre Grosjean.
Relation avec les fans
En tant que supporter, Bruno Venanzi partait évidemment avec les faveurs des sympathisants liégeois. Mais des erreurs de casting et de trop nombreux changements au sein du staff et de l’équipe dirigeante sèmeront le doute.
Après deux saisons consécutives en PO2, les supporters, jusqu’alors très calmes, commencent à hausser le ton et des banderoles fleurissent dans le stade et aux abords de celui-ci. Mais le président tient bon, il va à la rencontre de ses supporters et les écoute. C’est ainsi que, récemment, le club a procédé à une refonte de la Famille des Rouches. "Désormais, supporters et direction marchent dans la même direction", nous précise-t-on au club. Enfin, depuis l’arrivée du Liégeois, le club est plus que présent sur les réseaux sociaux. Lors de sa prise de pouvoir en 2015, le Standard n’avait même pas de compte Facebook.
Finances
En 2015, Bruno Venanzi demande à Roland Duchâtelet de retirer 10 M € des caisses afin de faire baisser le prix d’achat qui oscille entre les 16 M et les 19 M €. Ces 10 M €, le Liégeois les réinjectera quelques années plus tard. Lors de la prise de fonction de Bruno Venanzi, le Standard présente un déficit de 7 M €. "Mon premier cheval de bataille a été de ramener le budget à l’équilibre. Même si cela n’était pas populaire, c’était obligatoire. Aujourd’hui, c’est chose faite" , nous précisait Bruno Venanzi en février dernier. Aujourd’hui, les comptes liégeois sont plus que jamais dans le vert.
Roland Duchâtelet ne regrette pas le monde du foot
Après avoir vendu le Standard à Bruno Venanzi en 2015, Roland Duchâtelet s’est également délesté, en 2017, des 80 % de parts qu’il détenait encore à Saint-Trond.
Cette action marquait la volonté de l’ancien homme fort du Standard de quitter le monde du football. Une volonté renforcée en juin lorsque Duchâtelet a revendu toutes les parts qu’il détenait dans le club espagnol d’Alcorcon au groupe Best Navy S.L.
Encore propriétaire de Charlton, Duchâtelet cherche à s’en défaire puisque, là aussi, comme à Saint-Trond et au Standard, les fans réclament son départ à coups de manifestations. "Nous avons été promus, mais certains supporters continuent à manifester. Cela n’est pas dirigé vers le club, mais vers moi. Je vois cela comme une chasse aux sorcières. Ces supporters ne réagissent pas du tout de façon rationnelle. C’était pareil au Standard ? Mais mes méthodes n’étaient pas les pires, d’ailleurs, nous avons failli remporter un titre national", a précisé Roland Duchâtelet au quotidien Het Belang Van Limburg. Il a également parlé du Footgate. "Il y a quatre ans, suite à la perte du titre en 2014, j’avais déjà averti les autorités d’éventuelles magouilles. Mais peu de choses se sont passées ensuite." Et Duchâtelet de conclure : "À refaire, je ne mettrais jamais un pied dans le monde du foot."